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29 avril 2015 3 29 /04 /avril /2015 15:18

Roger MARTIN du GARD (1881-1958)

Prix Nobel de littérature en 1937.

Famille de la grande bourgeoisie.
Premier succès littéraire en 1913.
Mobilisé en 1914. «Témoin des atrocités du front, il ne veut pas écrire sur ce sujet, mais exprime son pacifisme idéaliste dans ses livres et son journal» (Wikipedia).

Après la guerre, l'écriture d'un long roman, «Les Thibault», va l'occuper de 1920 à 1940. Dans les deux derniers volumes «L'été 1914», il «décrit la marche à la guerre que n peuvent empêcher les socialistes ni les autre groupes pacifistes. Jacques Thibault ne saura que se sacrifier en lançant sur les tranchées un appel à la fraternisation des soldats français et allemands» (Wikipedia).

Le dernier volume, «Epilogue», raconte la longue agonie d'Antoine Thibault gazé pendant le conflit.

Les soins aux blessés

Antoine sourit et but une gorgée de lait pour s'éclaircir la voix:

    • «Vous avez pourtant fait du bon travail, Patron, depuis trois ans!»

    • «Non sans peine, je vous assure! Il chercha un autre sujet, n'en trouva pas et reprit:

«Non sans peine! Lorsque j'ai eu, en 1915, à m'occuper de l'organisation des services sanitaires, vous n'imaginez pas ce que j'ai trouvé!»

  • «C'était l'époque», continua Philip, «où les blessés étaient encore évacués dans des trains
    ordinaires, ceux qui avaient amené des troupes ou du ravitaillement... Quand ce n'étaient pas des wagons à bestiaux!... J'ai vu des malheureux qui avaient attendu vingt-quatre heures dans des compartiments non chauffés, parce qu'il n'étaient pas assez nombreux pour former on convoi réglementaire... Ils étaient nourris, le plus souvent, par la population... Et pansés, tant bien que mal, par de bonnes dames charitables, ou par les vieux pharmaciens du cru! Et quand, enfin, le train se mettait en marche, ils en avaient pour deux ou trois jours de trimbalage, avant qu'on les sorte de la paille... Aussi, dans presque chaque convoi, qu'est-ce-que nous avions comme pourcentage de tétaniques! Et on les empilaient dans des hôpitaux bondés, où l'on manquait de tout! d'antiseptiques, de compresses, et, bien entendu, de gants de caoutchouc!»

- «On était débordé...» Philip fit entendre son petit ricanement: «L'offre dépassait la demande..
La guerre exagérait sa casse. Elle ne se conformait pas aux prévisions des règlements!... Mais ce qui était sans excuse, c'est la façon dont la mobilisation médicale avait été conçue et faite! L'armée avait eu sous la main, dès le premier jour, un personnel de réservistes incomparables. Eh bien, quand j'ai été chargé de mes premières inspections, j'ai trouvé des praticiens notoires, infirmiers de seconde classe dans des ambulances qui étaient dirigés par des médecins militaires de vingt huit ou trente ans! A la tête des grands services chirurgicaux, des chefs ignares, qui avaient l'air de n'avoir jamais opérés que des panaris, et qui décidaient et pratiquaient les interventions les plus graves, amputaient à tort et à travers, simplement parce qu'ils avaient quatre ficelles sur leur manche, sans vouloir écouter les avis des civils mobilisés – fussent-ils chirurgiens des hôpitaux – qu'ils avaient sous leurs ordres!... Nous avons mis des mois, mes collègues et moi, à obtenir les réformes les plus élémentaires. Il a fallu remuer ciel et terre pour qu'on révise les règlements, pour que les répartitions des blessés soient confiées à des médecins de carrière... Pour qu'on renonce, par exemple, au principe absurde de remplir d'abord les hôpitaux les plus éloignés, sans tenir compte de la gravité des blessures et de leur urgence... On expédiait couramment à Bordeaux ou à Perpignan des blessés du crâne, qui n'arrivaient jamais à destination parce que la gangrène ou le tétanos les avaient achevés en cours de route! Des malheureux qu'on aurait sauvés, neuf sur dix, en les trépanant dans les douze heures!»

Les Thibault V – L'été 1914 (fin) – Epilogue - Folio

chapitre XIII – La consultation du docteur Philip

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22 avril 2015 3 22 /04 /avril /2015 12:49

Wilfred OWEN

Poète anglais né en 1893.
« Wilfred Owen s'enthousiasme très tôt pour la poésie et commence à écrire. En 1913, il débarque à Bordeaux où il enseigne sa langue. En octobre 1915, tandis que le conflit fait rage, Owen s'engage comme sous-lieutenant dans l'armée britannique. Lors d'un séjour à l'hôpital, il rencontre le poète Siegfried SASSOON, qui l'incite à se servir de son expérience de la guerre dans ses écrits. Suivent alors une série d'oeuvres majeures, où l'élégance novatrice de la forme appuie sa radicalité du propos. De son vivant ne publie que quatre poèmes. Car revenu au front, il est tué à Ors (Nord) le 4 novembre 1918, sept jours avant l'armistice. Ses poèmes paraîtrons en 1920. » ( quatrième de couverture de:«Wilfred OWEN, Et chaque lent crépuscule», édition Le Castor Astral)

Dans ce poème, «en peu de mots, privilège de poète, Wilfred Owen parvient à montrer l'horreur des gaz et l'effroi qu'ils provoquent» (Gilles Heuré, Le dégout de la guerre de 1914).

La première attaque chimique se produisit à Ypres le 22 avril 1915.

Dulce et decorum est …

Pliés en deux, tels de vieux mendiants sous leur sac,

Cagneux, toussant comme des vieilles, nous jurions dans la fange,

Quand enfin nous tournâmes le dos aux éclairantes.
Nous avions pris la longue route de notre lointain repos.

Les hommes marchaient endormis. Beaucoup allaient sans chaussures,

Avançaient en boitant, les pieds en sang. Tous estropiés, aveuglés,

Saouls de fatigue, sourds même aux hululements

Des 5.9 lents, dépassés, qui tombaient derrière eux.

GAZ! GAZ! Vite, les gars! En panique on déballe,

On passe juste à temps les masques encombrants...

Mais quelqu'un hurle encre, titube,

Se débat tel un homme dans le feu ou la chaux...

Forme vague derrière les verres troubles, l'épaisse lueur verte,

Comme au fond d'une mer je le vis se noyer.

Dans tous mes rêves, sous mes yeux impuissants,

Il s'écroule à mes pieds, crache, suffoque, se noir.

Si toi aussi dans ses cauchemars, tu pouvais suivre

La charrette dans laquelle on le jeta

Et voir ses yeux blancs rouler dans sa face,

Sa face pendante, comme d'un démon malade de son péché,

Si toi aussi, à chaque cahot tu pouvais entendre

Le sang couler à gros bouillons de ses poumons rongés,

Obscène tel un cancer, amer comme le pus

De plaies atroces et incurables sur des langues innocentes -

Alors, mon ami, tu ne raconterait plus avec tant d'allant

A des enfants avides de gloire désespérée

Ce vieux mensonge : Dulce et decorum est Pro patria mori.

Source : Wilfred Owen, Et chaque lent crépuscule

Le Castor Astral, 2012

Dulce et decorum est pro patria mori: Il est doux et honorable de mourir pour la patrie (Horace)

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13 avril 2015 1 13 /04 /avril /2015 14:53

38

Rupert BROOKE (1887-1915)

Poète anglais. Sa poésie attire de nombreux admirateurs (comme André Gide).
Mobilisé, il participe à «l'expédition Antwerp» pour défendre Anvers.
Embarqué pour aller combattre dans les Dardanelles, victime d'une septicémie, il meurt le 28 février 1915 sur un navire hôpital ancré en Grèce. Inhumé sur l'île de Skyros où se trouve encore sa tombe.«Cinq sonnets paraîtront en janvier 1915............ Ils donnent le ton d'un élan national qui va parcourir l'Angleterre. Ils servirons d'outils de communication pour favoriser l'enrôlement volontaire de jeunes soldats destinés à se sacrifier pour favoriser quelques carrières personnelles» (Rupert Brooke, L'ange foudroyé, de Christian Soleil, Mon petit éditeur)

Peace the first of his sonnets in the 1914 sequence

Now, God be thanked Who has matched us with His hour,
And caught our youth, and wakened us from sleeping,
With hand made sure, clear eye, and sharpened power,
To turn, as swimmers into cleanness leaping,
Glad from a world grown old and cold and weary,
Leave the sick hearts that honour could not move,
And half-men, and their dirty songs and dreary,
And all the little emptiness of love!

Oh! we, who have known shame, we have found release there,
Where there's no ill, no grief, but sleep has mending,
Naught broken save this body, lost but breath;
Nothing to shake the laughing heart's long peace there
But only agony, and that has ending;
And the worst friend and enemy is but Death.



Paix

Or je rends grâce à Dieu qui a choisi notre heure,
Surpris notre jeunesse, troublé ce sommeil:
La main affermie, l'oeil vif, la puissance aiguisée,
Nous quitterons, heureux nageurs plongeant dans l'eau limpide,

Le monde usé, ce monde las et froid,
Ces coeurs affaiblis que l'honneur n'émeut pas,
Ces moitiés d'hommes et leurs mauvais refrains,
Et tout le vide triste de l'amour!

Nous qui avons connu la honte, nous serons apaisés,
En ce lieu où malheurs et peines s'oublient dans le sommeil,
Seuls nos corps ici sont brisés, rien ne se perd que le souffle,

Et rien ne vient troubler la longue paix du cœur, et ses rires,
Qu'une funeste agonie, et ce qui s'en suit.
L'ami le plus terrible, et l'ennemi, n'est ici que la mort.




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7 avril 2015 2 07 /04 /avril /2015 15:27

37

Famille PAPILLON

En 1991, un couple de journalistes suisses achète une maison de village à Vézelay.

« On nous avait prévenu : dans la maison que nous venions d'acheter, à Vézelay, au pied de la basilique, nous ne trouverions rien d'extraordinaire. Mais en vidant les armoires, nous sommes tombés sur plusieurs petits paquets : la correspondance entre quatre fils de la famille Papillon envoyés au front de 1914 à 1918, leur sœur Marthe, employée de maison à Paris et leurs parents. Tout un réseau d'échanges intenses et par moments bouleversant : demandes incessantes de nouvelles, envois de colis à des soldats souvent mal nourris et mal vêtus, récits des combats de Verdun ou du Bois-le-Prêtre. Mais aussi de ces instants dérobés, sur le front, à l'horreur et à l'ennui : la maraude, le braconnage, la pêche ou la confection de bijoux faits du métal des obus...

Ces Papillon dont nous ne savions rien, la lecture de ces lettres surgies d'un silence de quatre-vingts ans le fait revivre. Miracle de l'écriture apprise sur les bancs de l'école publique. Littérature née du déchaînement de l'histoire. »

Dans ce livre extraordinaire se mêlent la peur, la mort, mais aussi la tendresse. Les historiens Rémy Cazals et Nicolas Offenstadt en témoignent : « Cette trouvaille étonnante dans les «archives» de simples Français de milieu populaire, ces échanges entre les membres d'une même famille offrent un ensemble tout à fait original. Ils livrent une multiplicité de points de vue sur le conflit en même temps qu'une lecture croisée des expériences de chacun. »

Extrait du quatrième de couverture du livre «Si je reviens comme je l'espère, Lettres du Front et de l'Arrière 1914-1918, Recueillies par Madeleine et Antoine BOSSHARD, Postface de Rémy Cazals et Nicolas Offenstadt, Grasset, 2003»

Carnage

Nous sommes au repos en attendant que l'on nous reforme. Nous n'avons plus d'officiers. Dans le bataillon, il nous reste un lieutenant et un sous-lieutenant.
Nous avons passé une semaine terrible, c'est honteux, c'est affreux; c'est impossible de se faire une idée d'un pareil carnage. Jamais on ne pourra sortir d'un pareil enfer. Les morts couvrent le terrain. Boches et Français sont entassés les uns sur les autres, dans la boue. On marche dessus et dans l'eau jusqu'aux genoux.

Nous avons attaqué 2 fois au Bois-le-Prêtre. Nous avons gagné un peu de terrain – qui a été en entier arrosé de sang.

Ceux qui veulent la guerre qu'ils la viennent la faire, j'en ai plein le dos et je ne suis pas le seul.

Dans la passe où nous sommes, la mort nous attend à tout moment. Donc inutile de rien m'envoyer.

Enfin, il ne faut pas désespérer, on peut être blessé. Quant à la mort, si elle vient, ce sera une délivrance.

Il n'est pas croyable qu'on puisse faire souffrir et manoeuvrer des hommes de pareil manière pour avancer de quelques mètres de terrain. Si jamais l'on rentre, on en parlera de la guerre! Tas d'embusqués et de plaqués, qu'ils viennent un peu prendre notre place, ensuite il auront le droit de causer...

Lettre de Marcel à ses parents le13 avril 1915

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30 mars 2015 1 30 /03 /mars /2015 09:57
Les quatre caporaux de Souain fusillés pour l’exemple

" Le 10 mars 1915 à cinq heures du matin, après deux mois d'accrochages sans résultat tangible dans le secteur et deux récentes attaques infructueuses, les poilus de la 21e compagnie du 336e régiment d'infanterie, reçoivent l'ordre d'attaquer de nouveau à la baïonnette et de reprendre les positions ennemies établies au nord du village de Souain.

Devant eux, le terrain est déjà jonché de cadavres et se trouve directement pris sous le feu des mitrailleuses allemandes. De plus, la préparation d'artillerie habituelle avant l'attaque, au lieu de secouer les positions allemandes, envoie ses obus sur la tranchée française et laboure le terrain d'assaut. Dans ces conditions, les hommes de la 21e Compagnie, épuisés après plusieurs jours de tranchée, démoralisés par les précédents insuccès, et ayant sous les yeux le spectacle des cadavres de leurs camarades tombés dans les fils de fer intacts, refusent, ce jour-là, de sortir des tranchées.

À cet instant précis, il est clair qu'ils anticipent l'échec et l'inutilité d'une attaque qui les voue à une mort certaine. Tout soldat paraissant sur le parapet étant immédiatement atteint par les balles. Plus tard, le bombardement des tranchées françaises fera l'objet d'une polémique, à la suite d'un témoignage : Le général Réveilhac, ordonnateur de l'attaque, aurait demandé à l'artillerie de pilonner les positions française pour obliger les soldats à sortir de leurs tranchées.

Suite à la désobéissance des hommes de la 21e, le général Réveilhac exige des sanctions. Le capitaine Equilbey, commandant de la compagnie, est alors tenu de transmettre à ses supérieurs une liste portant les noms de 6 caporaux et de 18 hommes de troupe, choisis parmi les plus jeunes, à raison de deux par escouade. Le 15 mars, le général donne l'ordre de mise de jugement directe des 24 hommes désignés.

Le procés :

Le 16 mars, les inculpés comparaissent devant le Conseil de guerre demandé par le général Réveilhac avec le motif : « refus de bondir hors des tranchées ». « Quiconque montait devait être fauché littéralement soit par les nôtres, soit par le feu des mitrailleurs allemands », déclarera le caporal Maupas lors de son interrogatoire. Le verdict acquitte les 18 hommes du rang et 2 caporaux (Gosselin et Lorin). Seuls 4 autres caporaux, tous originaires de la Manche sont condamnés à mort le 16 mars 1915. Si le refus de sortir des tranchées était indiscutable, la faute était partagée entre tous les hommes et le choix de ces 4 caporaux fut totalement arbitraire. Ils étaient tous coupables ou aucun ne l'était.

Le lendemain, 17 mars 1915, en début d'après-midi et deux heures environ avant que n'arrive le recours en grâce qui commuait la peine en travaux forcés, Théophile Maupas, 40 ans, instituteur de Le Chefresne, Louis Lefoulon, 30 ans, cheminot aux Chemins de fer de l'Ouest à Caen, Louis Girard, 28 ans, horloger, originaire de Blainville résidant à Paris et Lucien Lechat originaire de Le Ferré, 23 ans, garçon de café à Vitré sont fusillés par leurs camarades du 336e d'Infanterie à la Ferme de Suippes.

Maupas, marié, avait 2 enfants; Lefoulon un et vivait en concubinage. Girard, marié, avait aussi un enfant, seul Lechat était célibataire.

La réhabilitation :

Dès la fin de la guerre, la veuve de Théophile Maupas, soutenue par la Ligue des droits de l'Homme contactée dès le mois d'avril 1915, entama un combat pour la réhabilitation de son époux et des autres caporaux fusillés de Souain; combat contre les institutions, mené sans relâche, qui dura près de deux décennies et qui, en dehors de son activité d'institutrice, l'occupa à plein temps. Le 11 avril 1920, le ministère de la justice refusait d'examiner le dossier. Le 26 mars 1922, le dossier des caporaux de Souain était rejeté par la Cour de Cassation qui jugeait sur la forme sans trouver à redire sur le fond, puis une seconde fois le 21 avril 1926. Blanche Maupas créait alors le « Comité Maupas » qui deviendrait en 1928 « Comité national pour la réhabilitation des victimes de guerre ».

Par deux fois, malgré le long travail d'enquête, l'accumulation des témoignages et l'épaisseur des dossiers constitués par Blanche Maupas et la Ligue des Droits de l'Homme, les demandes de réhabilitation avaient été rejetées. Eulalie Lechat, la sœur du caporal Lechat, avait elle aussi créé un comité en 1923 avec l'aide de la Ligue des Droits de l'Homme. Le caporal Lechat fut ré-inhumé au cimetière du Ferré le 16 octobre 1924. Pendant plusieurs années, des meetings furent organisés dans toute la France; la presse régionale et nationale ne cessa de parler de l'affaire et les soutiens affluèrent de dizaines d'associations de mutilés de guerre et d'anciens combattants. Il y eut de nombreuses signatures de motions, des protestations devant la chambre des députés, toutes demandant la réhabilitation des caporaux de Souain.

Il fallut cependant attendre jusqu'au 3 mars 1934 pour que la Cour spéciale de justice accepte de juger sur le fond et donne un avis favorable à la réhabilitation des 4 caporaux de Souain. Cette cour, nouvellement instaurée pour examiner les dossiers en suspens des Conseils de guerre, comprenait, à côté des juges et à parité, des représentants des anciens combattants. Les épouses des fusillés reçurent le franc symbolique au titre de dommages et intérêts, mais l'essentiel était que ces 4 hommes soient réhabilités dans la mémoire des Français et que leurs veuves puissent enfin faire valoir leurs droits à pension. Blanche Maupas avait pu, à titre individuel, obtenir cette compensation dès 1921.

En 1925, à Sartilly, (Manche), lieu où Théophile Maupas avait été ré-inhumé en août 1923 en présence de 5 000 personnes, fut érigé un monument à la mémoire des Caporaux de Souain. Le nom de Maupas fut également donné à des rues, à Villeurbanne, Bréhal, où il avait enseigné, en 1970, Sartilly en 1995. L'école de Percy porte le nom de « Blanche et Théophile Maupas » depuis 1998.

Le film de Stanley Kubrick, Les Sentiers de la gloire, qui reste une fiction relative aux fusillés pour l'exemple de la Première Guerre mondiale, s'est inspiré en partie de ce fait réel. Un livre, Pour l'honneur de Théo et des caporaux de Souain, écrit par Jacqueline Laisné, l'institutrice qui prit la suite de Blanche Maupas dans son école, raconte également cette histoire. Blanche Maupas, décédée en 1962, avait aussi écrit un livre, paru en 1933, Le Fusillé, dont la réédition en 1994 comporte des illustrations de Tardi."

A la fin de la guerre, le général de division Réveilhac fut fait Grand Officier de la Légion d'honneur, de retour dans sa région d'origine, il mourrut paisiblement dans son lit en 1937.

Source : Wikipédia.

Rédigé à 21h54 dans Histoires de 22 fusillés pour l'exemple | Lien permanent


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30 mars 2015 1 30 /03 /mars /2015 09:48

Document rare, le Manifeste de la Conférence internationale des femmes socialistes, réunies à Berne en mars 1915, fut diffusé en France par Louise Saumoneau. Texte ci-dessous puis fichier au format pdf reproduisant le manifeste en son format d’origine :

FEMMES DU PROLÉTARIAT
Où sont vos maris ?
Où sont vo
s fils ?

Ils ont été arrachés à leur travail et, depuis huit mois, ils sont sur les champs de bataille.

Des jeunes gens, appuis et espoir de leurs parents, des hommes, jeunes ou à cheveux gris, qui nourrissaient leur famille, tous, ont endossé l’uniforme, vivent dans les tranchées et sont condamnés à détruire ce qu’un travail diligent avait érigé.

Des villes et des villages incendiés, des ponts détruits, des forêts anéanties, des champs dévastés : voilà les traces de leur activité.

Des millions d’hommes reposent déjà dans les fosses communes, des centaines et des centaines de milles, sont dans les hôpitaux, le corps déchiqueté, les membres mutilés, les yeux privés de lumière, le cerveau étiolé ou éteint, frappés par les épidémies ou tombés d’épuisement.

Femmes du Prolétariat !
La réalité, c’est qu’un double fardeau pèse sur les épaules des « faibles femmes ». Vous êtes livrées au chagrin et à la misère, vos enfants souffrent la faim et le froid, votre foyer est vide et morne.

On a parlé de la fraternité entre riches et pauvres, de la trêve des partis et des classes . Or, cette fraternité, cette trêve, se manifestent par des diminutions de salaires, que vos exploiteurs vous imposent, par l’élévation du coût de la vie, du fait de spéculateurs avides. L’Etat vous mesure parcimonieusement son aide, la philanthropie bourgeoise vous offre des soupes humiliantes et vous invite à l’épargne.

Quel est le but de cette guerre, cause de tant de souffrances ?

On vous dit : « Il y va de la défense de la Patrie et du bien-être qu’elle procure à ses enfants. » Qu’est-ce que cela veut bien dire ?

Serait-il question du bien-être des millions et des millions d’êtres humains dont la guerre a fait des cadavres des invalides, des chômeurs, des mendiants, des veuves et des orphelins ?

Qui menace la Patrie ? Est-ce que ce sont ceux qui, de l’autre côté de la frontière, vêtus d’un autre uniforme, et qui pas plus que vous , n’ont voulu la guerre, pas plus que vous ne savent pourquoi ils doivent tuer leurs frères ?

Non. La patrie est menacée par ceux qui sont riches et puissants de la misère des masses ouvrières qu’ils oppriment.

A qui cette guerre profite-t-elle ?

A une petite minorité dans chaque nation.

Aux fabricants de fusils et de canons, aux constructeurs de navires de guerre, aux fournisseurs de l’armée. Ils ont, pour leurs profits semé la haine entre les peuples et contribué à faire déclarer la guerre. La guerre est utile aux capitalistes en général. Le travail de la classe exploitée accumule des quantités de marchandi ses que les masses, trop pauvres, ne peuvent pas consommer. Pour que ces marchandises puissent s’ecouler, il faut, qu’après les avoir créées par son travail, l’ouvrier donne son sang pour leur ouvrir de nouveaux marchés extérieurs. Des colonies doivent être conquises pour que les capitalistes volent les richesses et les terrains et exploitent une nouvelle main-d’oeuvre.

Le but de cette guerre est donc, non la défense de la Patrie, mais son agrandissement. Ainsi le veut le système capitaliste qui ne peut subsister que par l’exploitation de l’homme par l’homme.

Les ouvriers n’ont rien à gagner dans cette guerre, ils ont tout à perdre, tout, tout ce qui leur est cher.

Les hommes des pays belligérants doivent se taire, la guerre a troublé leur conscience, paralysé leur volonté, mutilé tout leur être.

Mais vous autres femmes, vous avez à supporter soucis et peines pour ceux que vous aimez, qui sont sur les champs de bataille, et la misère à la maison.

Qu’attendez-vous donc encore pour manifester votre volonté de paix et protester contre la guerre ?

Qui peut vous retenir ?… Qui peut vous effrayer ?…

Jusque-là vous avez souffert pour ceux qui vous sont chers, maintenant il faut agir : pour vos maris, pour vos fils !…

Ce cri retentit dans toutes les langues. Des millions de femmes prolétaires le lancent. Il trouve un écho dans les tranchées où la conscience des fils du peuple se révolte contre l’assassinat.

A cette époque terrible, des femmes socialistes d’ Allemagne, d’Angleterre, de France et de Russie, se sont réunies. Votre misère, vos souffrances ont

pénétré leurs coeurs, elles vous appellent à la lutte pour la Paix , pour votre avenir et celui de vos enfants. Et, de même qu’au-dessus des champs de

bataille leurs volontés se sont unies, de même vous devez vous unir pour crier toutes ensemble : LA PAIX ! LA PAIX !

La guerre mondiale vous a imposé les plus grands sacrifices. Elle vous a enlevé les fils que vous aviez mis au monde dans la souffrance et la douleur, que vous aviez élevés au milieu des soucis et des peines. Elle vous enlève vos maris, vos compagnons de lutte dans la vie. Tout autre sacrifice est petit et insignifiant en comparaison de ceux-là.

L’Humanité tout entière fixe son regard sur vous, femmes du prolétariat des pays belligérants. Devenez les héroïnes, les sauveurs !

Unissez-vous ! que votre volonté soit une ! que votre action soit une ! Ce que vos maris et vos fils ne peuvent exprimer, c’est à vous de le dire, de le redire et de le redire encore :

Les travailleurs de tous les pays sont frères. Ce n’est que leur volonté unie qui peut mettre fin à l’assassinat des peuples.

Seul le Socialisme est la paix future de l’Humanité.

A bas le capitalisme, qui sacrifie des hécatombes d’êtres humains à la richesse et au pouvoir des classes possédantes !

A bas la guerre ! par et pour le socialisme !

Berne, mars 1915.

La CONFERENCE INTERNATIONALE DES FEMMES SOCIALISTES, à laquelle ont participé des camarades de : Allemaqne, Angleterre, Poloqne, Hollande, France, Russie, Italie, Suisse.

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24 mars 2015 2 24 /03 /mars /2015 21:25

COLETTE
En 1912 épouse en seconde noces Henri de Jouvenel, politicien, journaliste, qui lui offre une chronique dans le journal « Le Matin » dont il est rédacteur en chef.

En 1914 son mari est mobilisé. Ses chroniques de guerre (publiées en 1917 sous le titre « Les heures longues ») la conduisent en Argonne, à Verdun, en Italie... Elles ont parfois une teinte nationaliste et patriotique. On ne peut donc classer Colette dans les écrivains pacifistes. Mais la finesse de ses observations, non dépourvues d'humanisme, donnent une bonne idée de l'ambiance qui règne près du front et à l'arrière.

L'enfant de l'ennemi 24 mars 1915

Il va bientôt paraître au jour. Encore enfermé, palpitant à peine, il est déjà présent. Des journaux ont appelé, sur lui, tantôt la mansuétude et tantôt l'exécration. Les uns l'ont nommé « l'innocent », et nous ont fait de lui une peinture bien gênante, entre une mère pardonnée et un un soldat français miséricordieux... Mais on l'a traité aussi d'ivraie empoisonné, de crime vivant, et on l'a voué à l'obscur assassinat...

Les deux camps en sont là. Nous aurons bientôt les conférences sur l'Enfant de l'Ennemi... Cela est d'une tristesse affreuse. Pourquoi tant de paroles, tant d'encre répandues sur lui, et sur sa mère humiliée ?

    • Mais il faut bien conseiller, guider ces malheureuses qui...

Non. Elles n'en n'ont pas besoin. Elles n'en sont plus aux premières heures, aux premiers jours de sombre folie, où elles criaient leur honte et suppliaient : « Que faire ? Que faire ? » Croyez-vous qu'une amère méditation qui dure trente-six semaine ne porte pas ses fruits ? Donnez, à celles qui manque de tout, un abri, la nourriture, quoi encore ?... Du travail... une layette... et puis fiez-vous à elles. La plus révoltée, la plus vindicative n'est plus, maintenant, capable d'un crime, en dépit de ceux qui l'en absoudraient d'avance.

    • Mais que fera-t-elle ?

Laissez-la. Peut-être n'en sait-elle rien encore. Elle le saura en temps voulu. Elle souffre, mais l'optimisme dévolu à la femelle alourdie d'un précieux poids humain combat sa souffrance, plaide pour l'enfant qui tressaille et dote la mère d'un instinct de plus : celui de ne pas penser trop, de ne pas dessiner l'avenir en traits noirs et nets. La plus vindicative, celle même qui s'éveille, la nuit, en maudissant le prisonnier impérieux de ses flancs, n'a pas besoin qu'on l'éclaire.Il se peut qu'elle attende, furieuse et épouvantée, l'intrus, le monstre qu'il faudra, sinon écraser au premier cri, du moins prescrire... Mais ayons confiance dans la minute où elle connaîtra, épuisée, adoucie, sans défense contre son instinct le meilleur, que le monstre est « seulement » un nouveau-né, rien qu'un nouveau-né avide de vivre, un nouveau-né avec ses yeux vagues, son duvet d'argent, ses mains gaufrées et soyeuse comme la fleur du pavot qui vient de déchirer son calice...

Laissez faire les femmes. Ne dites rien... Silence...

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8 mars 2015 7 08 /03 /mars /2015 21:39

Charles VILDRAC, (né Charles MESSAGER)

né en 1882 à Paris, décédé en 1971 à Saint-Tropez?
Poète et dramaturge
Père communard déporté en Nouvelle-Calédonie, mère institutrice.
1901 rencontre Georges DUHAM
EL
1905 épouse Rose Duhamel sœur de Georges.
1906 les deux beaux-frères fondent l'Abbaye de Créteil avec d'autres amis
1914 mobilisé comme fantassin et brancardier
Du front continue d'écrire des poèmes publiés dans différentes revues pacifistes réunis en 1920 dans «Chants du désepéré».
1941 collabore à «L'honneur des poètes» publiant des poèmes sous le nom de Robert BARADE.
1942 Participe à «Lettres françaises» journal clandest
in
1943 Emprisonné trois mois à Fresne
1960 Signataire de l'Appel à l'insoumission en Algérie


ÉLÉGIE a Henri DOUCET Tué en mars 1915


Pendant trente ans ton père a fabriqué
Des fusils Lebel, à la Manufacture;
Et maintenant qu’elle est finie, la guerre,
Le voici retraité.

Il trouve encore à s’employer aux champs,
Mais il est triste ; il pense à son fils mort;
Il pense au temps où il t’aidait le soir
A broyer tes couleurs, à tendre tes toiles;
Au temps où le dimanche, au petit jour,
Vous partiez à la pêche ensemble.

Et son métier aussi, lui manque:
Le voici dévêtu de la vieille habitude;
Il n’aima pas en vain sa tâche tant d’années.

Mais comme il ne sait pas démêler ses regrets
Ni penser au delà de ses mains travailleuses,
Cœur trop simple, il confond dans la même tendresse
Son temps de père heureux et les jours sans reproche
Où ses doigts ajustaient d’innombrables fusils
Semblables au fusil qui tua son enfant.

Poème extrait de Chants du désespéré (1914-1920),
Paris, Nouvelle Revue Française, 192
0.


Henri DOUCET (1883-1915)
dessinateur et peintre français.
Adhéra au phalanstère de l'Abbaye de Créteil.
Bien que non mobilisable s'engagea en 1914.
Tué à Hooge près de l'Yser le 4 ou 5 mar
s 1915

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3 mars 2015 2 03 /03 /mars /2015 09:36

Edith WARTON
Avant guerre, Edith Warton, amie de Jean Cocteau, André Gide ou Henri James, fréquente les salons littéraires et artistiques et fait partie de ces personnalités intellectuelles tourbillonnantes qui font les belles heures du tout Paris. Mais, rapidement, elle s'occupe de récolter des dons pour venir en aide aux blessés et sillonne l'arrière comme les lignes près du front, livrant une remarquable série de reportages qui décrivent la France et ses habitants, combattants ou non, tels qu'ils sont devenus. En 1916 elle publie ses reportages sous le titre «Voyage au front, de Dunkerque à Belfort.»

Silhouettes de Paris

Février 1915

… Un moment, en septembre et octobre, les allées et venues de soldats anglais et le branle-bas des autos militaires britanniques animèrent les rues de Paris. Puis les fraîches figures et les coquets uniformes de khaki disparurent, et maintenant Paris n'offre plus aux curieux, comme spectacle militaire, qu'une poignée de pioupious faisant parfois l'exercice sur la place des Invalides.

Mais il y a une armée à Paris. Le premier détachement en est arrivé, il y a des mois, par ces jours sombres de septembre, lamentable arrière-garde de la retraite des Alliés sur Paris. Depuis lors, le nombre en est sans cesse augmenté, et le flot sordide s'est infiltré dans tous les courants de la vie parisienne. Partout, dans tous les quartiers, à toute heure, parmi la foule affairée des parisiens au pas assuré et vigoureux, on voit ces gens à la démarche lente, le regard fermé, hommes et femmes portant sur le dos des paquets misérables, traînant sur le pavé leurs souliers râpés, tirant par la main de pâles enfants, ou pressant contre leur épaule des marmots endormis – la grande armée des Réfugiés. Impossible de confondre ou d'oublier ces visages. Quiconque a rencontré ces yeux plein d'un muet ahurissement, ou cet autre regard angoissé où se voit le reflet de flammes et de ruines, ne peut secouer la hantise de cette vision. La physionomie des réfugiés fait partie de la physionomie de Paris. C'est l'ombre sur l'éclat du visage que la ville tourne vers l'ennemi. Ces pauvres gens ne sont pas de ceux qui peuvent, au-delà des frontières, pressentir le triomphe final: pour eux, le monde est borné par l'ombre de leur clocher. Ils labouraient et semaient, filaient et tissaient, et vaquaient à leurs humbles occupations, quand soudain, d'épaisses ténèbres pleines de feu et de sang les ont enveloppés. Et maintenant les voilà au milieu de visages étrangers et d'habitudes nouvelles, seuls avec cette vision sanglante de foyers en flammes, d'enfants massacrés, de jeunes hommes traînés en esclavage, de vieillards foulés aux pieds par des soudards ivres de carnage, de prêtres assassinés au chevet des mourants. Ce sont ces gens qui par centaines attendent chaque jour aux portes des abris improvisés, et qui, en échange de tout ce qui fait la douceur de la vie, de ce qui la rend intelligible, ou du moins supportable, reçoivent un lit de camp dans un dortoir, un bon repas – et peut-être,les jours de chance, une paire de chaussures éculées!

Chaque jour, sur les trottoirs, s'accroît le nombre des silhouettes d'éclopés, et de pâles têtes bandées dans les voitures qui passent. Au théâtre et au concert on aperçoit des uniformes, et ceux qui les portent doivent, en général, attendre que la salle soit vidée pour sortir en clopinant, appuyés sur un bras secourable. La plupart des blessés sont très jeunes, et c'est l'expression de leur figure que j'aimerais à peindre et à interpréter comme étant l'essence même de ce que j'appelle: le visage de Paris.Ils sont graves, ces jeunes visages: on entend beaucoup parler de la gaîté dans les tranchées, mais les blessés ne sont pas gais. Ce n'est pas dire qu'ils soient tristes. Ils sont calmes, méditatifs, étrangement épurés et mûris : la grande épreuve par laquelle ils ont passé semble les avoir purifiés de toute petitesse, de toute frivolité. Elle paraît les avoir pénétré jusqu'à la moelle, s'emparant de la substance même de leur âme pour la modeler en quelque chose de si fort, de si magnifiquement trempé, que de longtemps la physionomie de Paris ne voudra devenir indigne de la leur.

Source: Le dégoût de la guerre de 1914

Mercure de France 2014

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24 février 2015 2 24 /02 /février /2015 10:26

ALAIN
Emile-Auguste Chartier dit Alain est né à Mortagne-au-Perche le 3 mars 1868. Philosophe, journaliste et professeur de français, il publie dès 1903 plusieurs milliers de chroniques sous le nom d’Alain et est connu comme pacifiste avant guerre. A la déclaration des hostilités, bien que non
mobilisable, il s’engage dans l’artillerie et est affecté au 3ème régiment d’artillerie lourde. Gravement blessé accidentellement au pied à Verdun le 23 mai 1916, il fait un court séjour aux services météorologiques de l’armée, sera démobilisé en 1917, restera estropié et reprendra sa carrière de professeur. Son nom reste attaché au pacifisme et à l’antifascisme. Il décède au Vésinet le 2 juin 1951 et est enterré au cimetière du Père Lachaise. (Dictionnaire des témoins de la Grande Guerre)


De la révolte

On sait qu'il n'y a jamais de guerre sans quelques mouvements de mutinerie. De tels événements sont mal connus, et toujours expliqués par des causes accidentelles, comme la mauvais nourriture, ou une bataille malheureuse, ou la faute lourde d'un chef. Comme si l'on voulait oublier ou faire oublier. Selon mon opinion, de telles causes sont plutôt des occasions que des causes. La révolte est au fond, et permanente. Je dirai presque d'institution dans n'importe quelle troupe. J'en ai vu des signes chez les plus dociles d'apparence, et voilà certainement ce qui m'a le plus étonné lorsque j'ai vu ces choses de près et du dedans, jusqu'au temps, qui arriva vite, où je fus obligé de lutter en moi-même contre des sentiments de ce genre. Aussi, tout en me défendant d'espérer un tel redoublement de maux, j'attendais quelque terrible punition au jour de la délivrance.Mais les pouvoirs gagnent une partie après l'autre, et j'aperçois à peu près comment les choses se passent. Je me souviens de ces sentiments, parce que je les ai surmontés; mais eux, autant que je sais, mes naïfs compagnons, ils les ont subis; ils peuvent les éprouver encore, et soudainement, par quelque circonstance extérieure, mais ils ne savent pas les retrouver volontairement; ils n'y pensent jamais. L'homme est facile à gouverner.

MARS ou la guerre jugée

chapitre24

NRF 1921

23500 soldats français ont perdus la vie au cours de ce mois de février 1915, 350000 depuis le début du conflit.

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